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Le souffle du passé -15- (Feuilleton)


Le souffle du passé                                             15

 Ce matin, la mer était en colère. De lourds rouleaux venaient s'écraser sur le rivage, et s'étalaient en tapis de mousse blanche. Julien ouvrit les persiennes et fut étonné de surprendre la Nature dans un déshabillé vaporeux apporté par le vent marin. Quelques déchirures, dans cette parure, laissaient entrevoir des nuages, comme des grains de beauté, qu'elle cherchait pudiquement à cacher. Des paquets de brume montaient des étangs et se dispersaient dans l'ascension.

 Julien décida d'attendre, avant de partir en exploration. 

 Il récupéra son téléphone et se mit à consulter les messages qui s'entassaient depuis son départ de Paris. Surtout des appels de copains, qui l'encourageaient à faire la fête, de ses collaborateurs qui l'enviaient de se prélasser à Monte Carlo tout en précisant que c'était une détente méritée, tant il avait fait pour la boîte. Il remarqua rapidement le message d'hier qui était accompagné d'un dossier marqué CHMM.

 Il en prit rapidement connaissance et au fur et à mesure de sa lecture, opinait de la tête, lui trouvant un réel intérêt. En résumé, ses collaborateurs, sans rentrer dans les détails soulignaient le côté grandiose de l'entreprise et la chance pour la «boîte» de monter en puissance. Ce n'est pas tous les jours que l'on vous propose un chantier qui court sur cinq années, avec la perspective de contruire un complexe hôtelier entouré de quatre vingts villas. Celà ne devrait pas être compliqué d'être épaulé par de grandes entreprises de bâtiment public, relayées par les artisans locaux., imagina-t-il.

 Julien entrevit les cinq prochaines années, à suivre ce dossier de près, à en voir la réalisation, la sortie de terre de tout un petit village...mais pour l'instant, il fallait déjà qu'il donne son accord. A la fin du message une phrase spécifiait qu'il devait prendre contact avec une dame dont le numéro de téléphone était noté.

 Dans un premier temps il envoya à Denise un texto laconique: OK pour moi. 


 Le voile de brume  s'estompait, reculant sous les assauts des rayons de soleil. Une odeur de terre fraîche remontait du sentier et le ballet des échassiers avait repris; les pélicans de leurs becs longs et larges remplissaient leurs poches, les cols verts de leurs pattes palmées plongeaient en bascule à la recherche de nourriture avant d'aller s'abriter dans les prés salés. L'eau des étangs virait au vert.

 A travers les branches du figuier il remarqua une tache brune qui se déplaçait et semblait sortir du bunker. Un bruit sourd de moteur, porté par le vent marin arrivait  jusqu'à ses oreilles. Il descendit en vitesse l'escalier de bois, et partit se cacher sur la terrasse, derrière les montants d'un auvent. En se penchant sur le côté il vit une barque plate se balancer sur l'eau, avec  un homme tenant le gouvernail et un autre vêtu de noir montant à bord. Sans plus attendre, le bateau changea de cap  pour repartir vers le chenal. 

 Julien était intrigué par cette arrivée soudaine, fendant un brouillard qui redoublait à nouveau et décida d'aller fouiner dans le bunker. 


 Il déjeuna en vitesse. Surveillant les alentours, il se faufila jusqu'à la pinède en passant par le sentier côtier, pour ne pas marcher à découvert. Il voulait s'approcher du bunker sans se faire remarquer. 

Etait-ce une interprétation de sa part? L'impatience de revenir sur les lieux qu'il n'avait pas suffisamment explorés? Ou bien avait-il vraiment observé l'empressement  avec lequel la manœuvre avait eu lieu? Il fallait qu'il assouvisse sa curiosité.


À SUIVRE...


JACKY ARLETTAZ