Accueil > Blog > Culture, médias > Le souffle du passé -19- (Feuilleton)

Le souffle du passé -19- (Feuilleton)


Le souffle du passé                             19   

                                    

 « Dix- huit ans déjà ! se répéta-t-il, reprenant ses esprits, en secouant la tête. D'abord dix- huit années à précéder le temps, à traverser une adolescence sans se retourner, sans regrets, avec une énergie renouvelable à souhait. Et ensuite, dix- huit ans à courir derrière le temps qui s'emballe, et vous laisse désarmé, au milieu du gué, emporté par une vie qui coule inexorablement vers l'amour, l'amer...la mort, » conclut-il, désarmé.

 Pour ne pas se laisser emporter par ces idées sombres mais réalistes, il décida de profiter d'un regain de soleil pour aller sur la plage.


 Les vagues amenées par le vent marin, furent de bons sparing-partner, pour se défouler. Il multiplia les plongeons, les acrobaties dans l'eau. La force du courant était telle, qu'à chaque vague il chancelait et manquait perdre pied.

 Il adorait prendre le large à la nage et revenir avec ce qu'il appelait un taxi : rejoindre le rivage en se coulant dans l'eau, et se laisser porter le plus longtemps possible. Il avait remarqué qu'il y avait une technique pour réaliser la plus longue course : il fallait ne pas rater l'arrivée de la vague, si possible une vague ambitieuse, rageuse, donner une impulsion au départ et bien s'allonger dans le flot, sur la crête, mains tendues en avant, en restant à la surface. Ainsi il passa sa matinée à concourir contre lui-même, toujours plus loin, essoufflé.


 Julien se surprit à tomber encore dans le piège de la compétition, du challenge à relever, de la mission à accomplir, de faire toujours mieux, toujours plus, et de garder en cage les rêves qui ne demandaient qu'à voler : pourquoi ne pas suspendre le temps   et ne lui redonner que la place qu'il mérite ? Dans ce cadre-là, ce pourrait être… celle d'un grain de sable, de la valeur d'un instant. Un infime instant. Un, sans importance, parmi tant d'autres, qui jonchent la grève.

  

 Brûlé par un soleil ardent, et fatigué par les courses pour trouver un bon taxi, Julien pensa à se restaurer, poursuivre par une bonne sieste dans le hamac tendu sous les canisses, et aller faire un saut aux salins.


 Les rayons du soleil flirtaient avec le sommet de la colline, lorsqu'il emprunta le chemin de terre. Après avoir longé la lagune, il vit apparaître les monticules de sel gris, mordus sur les côtés, qui laissaient apparaître des flancs d'une blancheur étonnante.

 Plus loin, un bâtiment prolongé par des hangars, était cerné par un grand parking. Il pressa le pas, et pénétra à l'intérieur d'une grande cour en se mêlant à un groupe de personnes qui avançaient en file indienne. Après un bref temps d'arrêt, il entendit une voix qui enjoignait les visiteurs à s'avancer, à se mettre en cercle autour du guide.

 Quelle ne fut pas sa surprise de voir Julie, robe légère à fines bretelles, s'adresser aux visiteurs en leur proposant une visite guidée dans les bassins, recommandant de ne pas s'éloigner de certaines zones et surtout de rester grouper. La visite, précisa-t-elle, durera une heure.

 Julie remarqua la présence de Julien et, à son tour surprise, lui asséna un sourire de bienvenue.

 Elle semblait à l'aise dans ce rôle, et comme une professionnelle aguerrie, répondait à la curiosité des touristes, avec aisance.

 Après le parcours sur les digues, entre les tables salantes, le contournement des trémies, elle prit congé des visiteurs près des camelles.

 

À SUIVRE...


JACKY ARLETTAZ