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Une lumière verte dans la brume


Une lumière verte dans la brume

  L'expression «Ce ne sera plus comme avant!» s'étale sur toutes les «Une» des journaux, résonne sur tous les plateaux de télévision, et agite notre conscience de citoyen.

 Fallait-il qu'une maladie devienne, étrangement, le médecin le plus écouté de la planète, pour  dévoiler au grand jour, le diagnostic d'une Société ...au «Grand Corps Malade» ? Un Corps au cerveau obnubilé par la compétition et le gain, au cœur obstrué de personnes sans gain, à l'appareil digestif qui laisse trop de gens mourir de faim. Sans oublier les «soit disant» membres supérieurs toujours en quête de cueillette et de récolte, qui méprisent les «soit disant» membres inférieurs que l'on fait marcher... en leur promettant des lendemains meilleurs. 


 Cela nous ramène au concept de crise, à ses deux origines sémantiques, l'une grecque, l'autre chinoise (c'est vraiment d'actualité).

 En grec, la crise (krisis) renvoie à la crise aiguë d'une maladie (tiens, tiens), au dénouement d'une situation. La crise correspond dans ce cas au sommet critique, à la période extrême dans l'évolution des choses.

 En chinois, le mot crise est formé de deux idéogrammes: l'un signifiant danger, l'autre opportunité. D'où sa double la double vision, pessimiste (la fin de quelque chose), et optimiste (le début d'autre chose).  

 Ces trois significations du mot crise conduisent à trois analyses différentes.

 La première est une vision médicalisée de la crise,  dont l'origine dans ce cas, est externe, et renvoie à une idéologie conservatoire: il conviendra d'éliminer l'élément pathogène afin de revenir à l'équilibre antérieur. 

 Ou la crise peut être observée comme la résistance à la modernité d'un système qui apparaît incapable de se transformer et qui néanmoins devra le faire. Le changement est dans ce cas, désiré, mais il n'advient pas à cause de résistances présentes à l'intérieur du système.

 Enfin, la crise peut être regardée comme la conséquence, dans une organisation, une institution, d'une exacerbation des tensions sociales entre les partenaires impliqués. Ces tensions parvenues à maturité, ne peuvent plus se résoudre sans une transformation des rapports sociaux eux-mêmes. 

 Il pourrait être pertinent, peut-être, de se nourrir des deux cultures: emprunter à la culture grecque, le temps Kairos, qui est le temps comme basculement décisif, comme opportunité, le bon moment pour agir; et emprunter à la culture chinoise l'idée de temps qualitatif, commencement d'autre chose.

  

 Le confinement aura servi à montrer les travers d'une société aux dérives multiples mais qui n'en garde pas moins, un fort élan humaniste. La crise durera certes, mais devra être une formidable opportunité: permettre de poser aux gouvernants des questions clés et tenter de les résoudre afin que la société et la gouvernance mutent ensemble. La politique est une chose trop grave pour n'être confiée qu'aux hommes politiques!

 Le confinement aura permis de vérifier qu'il ne peut exister de société durable avec des  liens sociaux faibles, et une prise de conscience morale, certes, mais impuissante. Dorénavant, les mesures réparatrices pour «réchapper» une population en manque d'oxygène, ne suffiront pas à  convaincre une nation alignée sur des normes mondiales sans âme. Notre idée de progrès, dusse-t-elle en souffrir, devra conjuguer avancée avec valeurs anciennes dénigrées, compétition avec collaboration, innovation avec rétroaction, au prix d'un saut plus qualitatif, que quantitatif. 


 C'est en pensant  au courant littéraire américain « la génération perdue» de l'entre deux guerres, qu'il importe que notre génération ne soit pas identifiée comme telle. Et particulièrement, à un auteur qui aura marqué ce courant, au même titre qu'Hemingway : Scott Fitzgerald, auteur de Gatsby Le Magnifique. A l'occasion, en souvenir de ce «magnifique roman», nous pourrions être attirés, comme le personnage principal éponyme, par cette lumière verte dans la brume, sur l'autre rive, que l'on devine le soir ...que l'on espère,....  et qui n'est autre que l' Espérance. 

Jacky Arlettaz


Crédit Photo : Photolink1 & Luckystep