Du latin desiderare (« regretter l’absence de quelqu’un ou quelque chose »), dérivé de sidus («constellation, étoile ») : dans la langue des augures ou des marins, constater l’absence d’un astre signifiait déception, regret, au contraire de considerare, constater sa présence
Le désir note, pour la déplorer, une absence.
À quels niveaux faut-il classer le désir, l’envie ?
L’envie serait plus facile à gérer que le désir. Il y a les envies du quotidien, envies naturelles. Elle est plus basique, plus simple, plus commune , moins compliquée.
Le désir plus compliqué, plus évolué, plus élaboré.
Pour la psychanalyse l’envie est consciente, le désir touche plus à l’inconscient.
Les désirs ont du mal à s’auto-avouer, ils peuvent être refoulés par une éducation prégnante, des déterminisme culturels et/ou moraux. Dans les procès on essaye de voir quel est le degré de conscience (responsabilité) des personnes qui sont passés à l’acte
Le désir a une connotation de superflu, de confort et est associé à la notion de plaisir.
Mais peut-on désirer ce qu’on ne veut pas et peut-on vouloir ce qu’on ne désire pas ? Avec la publicité, on peut finir par vouloir quelque chose qu’on n’a jamais désiré. On peut être obligé de partir à la guerre sans le désirer et être dans l’obligation de tuer sans le désirer non plus. (mais n’est-on pas dans le désir de sauver sa vie?)
Le désir peut être imposé par les déterminismes culturels. Comme le 10ème commandement judeo-chrétien : « Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain ; tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son boeuf, ni son âne, ni rien de ce qui est à ton prochain. (Exode 20:17)
Autre nuance du désir le souhait.
Dans le bouddhisme il y 4 axiomes (Les 4 Nobles Vérités), la 1ère étant que la vie est difficile, la 2ème que l’origine de cette difficulté est dans le désir, la 3ème est qu’on peut avoir une vie sereine malgré cela et la 4ème est la voie pour atteindre cette sérénité. Mais on peut penser qu’il y a une mauvaise traduction du mot Tanha qui en pali veut dire « soif inextinguible ». C’est donc plus qu’un désir c’est un désir sans repos.
Dans Le Banquet de Platon, Éros, le désir, est le fils de Pénia (la pauvreté) et de Poros (l’oppulence). Le désir est donc issu d’un manque et d’un excès.
La satisfaction d’un désir n’épuise pas le désir. Le désir est sans fin.
L’équivalent grec de l’extinction du désir bouddhiste est l’ataraxie. C’est une discipline du désir mais pas une mortification. Une chose est de dominer ses désirs, une autre de mortifier son corps.
Le désir est souvent mimétique, le désir de ce dont l’autre jouit. Les choses en soi n’ont pas de valeur, c’est le désir du désir de l’autre.
Exemple du mari qui désire sa femme quand elle est désirée par l’amant de son ex femme. Son autre nom est la jalousie.
Les héros de Proust ne désirent que parce qu’ils sont jaloux (Swann). La jalousie est l’ombre de l’amour mais est inséparable du désir de l’autre. On désire ce qui nous manque et ce qu’on n’est pas. On ne désire quelqu'un que s’il est convoité par quelqu'un d’autre.
Alors qu’Augustin d'Hippone a dit « Le bonheur, c’est de continuer à désirer ce que l’on possède.» N’est-ce pas la définition de l’amour ?
Le désir n’est en soi ni coupable, ni innocent. L’homme est un être de désir. Même si les humains n’ont pas tous les mêmes désirs et n’empruntent pas tous les mêmes chemins pour les réaliser. Certains, par honte, n’assouvissent pas leurs désir parfois. La personne n’est comptable en rien du tout de ce désir refoulé, on ne peut pas être coupable de ce qu’on a seulement pensé.
Voir le film Minority Report (Steven Spielberg, 2002) où des êtres humains mutants, les précogs, peuvent prédire les crimes à venir grâce à leur don de précognition. Grâce à ces visions du futur, la ville a réussi à éradiquer la criminalité et les agents de l'organisation gouvernementale Précrime peuvent arrêter les criminels juste avant qu’ils ne commettent leurs méfaits.
Dans l’histoire humaine, les femmes ont su désirer les hommes qu’il fallait pour que la préservation de l’espèce (mâle dominant).
Le désir peut-il s’imposer à nous ? Histoire d’Onan, personnage biblique, après la mort de son frère aîné Er sans enfants, son père lui enjoint de s’unir à sa belle-sœur afin de donner une postérité à son frère mais il s’y refuse, détruisant sa semence afin de ne pas donner de descendance à son frère. Il se rend de la sorte mauvais aux yeux de YHWH qui le met à mort. (d’où l’onanisme, masturbation).
Le désir est il culturel. Des besoins deviennent des désirs. Mais l’inverse est vrai aussi par exemple la voiture est un désir qui devient besoin un besoin à la campagne pour aller travailler.
Karl Marx regarde comment les besoins de la vie quotidienne sont satisfaits (mode de production).
Il y a le désir des hommes dans la course vers l’altitude dont l’acmé dans la Bible est la tour de Babel. Désir de puissance symbolisé dans le village San Gimignano delle belle Torri en Toscane où c’était à qui construirait la maison-tour la plus haute. Posséder une tour était un symbole de richesse et de pouvoir. Au fil des décennies, la ville a connu une hausse constante du nombre de tours élevant la cité haut dans le ciel. A la fin du 14ème siècle, la ville ne comptait pas moins de 72 tours et certaines d’entre elles mesuraient plus de 50 mètres de hauteur. La construction des tours s’est finalement arrêtée lorsque le conseil communal a ordonné l’interdiction qu’une tour soit plus grande que celle adjacente au Palazzo Comunale.
Nous avons aussi cela dans la sphère végérale où les arbres peuvent faire la course au soleil en montant le plus haut possible, mais nous sommes plus dans un besoin.
Le désir ne naît pas ex nihilo, on ne peut désirer que ce que l’on a connu.
L’éducation, la culture, la publicité fabriquent nos désirs
Histoire de la Peau de chagrin de Balzac qui montre le conflit entre désir et longévité. La peau de chagrin magique représente la force vitale de son propriétaire et se racornit à chaque satisfaction de son désir, d'autant plus s'il vise à l'accroissement de puissance. Ne tenant pas compte de la mise en garde de l'antiquaire qui lui offre cette peau, le héros s'entoure de richesses mais se retrouve misérable et décrépit à la fin du roman : « Vouloir nous brûle et Pouvoir nous détruit »
Le désir ne dépend pas de notre volonté, la culpabilité ne peut intervenir que dans la satisfaction du désir. Mais au contraire pour les stoïcien on peut maîtriser le désir car il dépend de nous. Le désir doit être maîtrisé et il y a un certain bonheur dans cette frustration,
Pour les Grecs (et le paganisme en général) il est innocent mais il faut le limiter ce qui est différent avec la culture judéo-chrétienne. Voir Nietzsche qui critique la morale religieuse et ses idéaux ascétiques (Généalogie de la morale).
Il y a le péché originel d’Adam, et « corps, esprits et charité » les trois concupiscences de Pascal (Libido sentiendi, libido sciendi, libido dominandi).
Dans l’esprit chrétien le désir est coupable, la terre est une planète de malédiction : « La terre est maudite à cause de toi. » (Genèse 3.17-18)) ou dans Jean 2.17 « Or le monde passe, et la concupiscence du monde passe avec lui ; mais celui qui fait la volonté de Dieu, demeure éternellement. »
Les personnes fichées S sont non coupables tant qu’elles ne sont pas passées à l’action, de la même manière la personne suspectée d’être pédophilie n’est pas coupable tant qu’elle n’est pas passée à l’action. D’un autre côté pour les « Fiché S », s’ils le sont c’est probablement parcequ’ils ont déjà exprimé un désir condamnable (réseaux sociaux).
Pour le biologiste derrière le désir il y a la pulsion qui ne passe pas par le philtre de la religion. la sélection sexuelle étant la pierre angulaire de la sélection naturelle. Ces pulsions nous ont permis de devenir ce que nous sommes sans elle nous ne serions restés que des « vers de terre ».
Ce que nous condamnons à notre époque ne l’a pas toujours été, par exemple les pharaons égyptiens se mariaient dans leur fratrie.
Pour Freud il n’y a pas de mots pour désigner la faim sexuelle il la désigne sous le nom de « libido ».
Où la culpabilité se situe-t-elle ? En nous ? De l’extérieur ? Elle est différente suivant les époques, les gênes. Il y a donc une relativité de la culpabilité. Ainsi dans les années 70 il y avait Tony Duvert, célèbre écrivain qui s'est ouvertement déclaré pédophile et a prôné dans son œuvre la sexualité entre adultes et enfants, mais aussi Gabriel Matzneff
Mai 68 est une rupture pour une nouvelle société permissibe avec une idéologie du désir (rappel des slogans comme « Il est interdit d’interdire »)
Maintenant tel un pendule, nous avons un retour à un pseudo ordre moral. Certains parlent d’un « neo féminisme puritain » qui prétend criminaliser le désir (Affaire Picasso) alors que l’art qui n’e-il pas au-delà du bien et du mal (« Suspendre le jugement moral ce n’est pas l’immoralité du roman, c’est sa morale. Kundera) et on redécouvre la censure (Nouveaux procureurs Pinard?)
La culpabilité est liée au chemin emprunté pour assouvir le désir et c’est à la loi de le dire.
Ulysse désire écouter les sirènes, mais pour rester raisonnable demande à ce qu’on l’attache au mât de son bateau pour qu’il ne les rejoigne pas.
Qu’est ce qu’on désir vraiment si on veut le bonheur ?
Ce qu’on désire c’est être meilleur, désirer autre chose que ce que l’on a pour évoluer vers mieux.
Usons et abusons de tout ce qui nous fait du bien et ne fait de mal à personne.
L’épicurisme est une philosophie de la mesure, pour rester dans une norme acceptable socialement.
Le désir ne manifestet-il pas notre besoin de dépasser notre horizon, de sortir de notre bulle, de notre cercle
Le propre du désir est la capacité à projeter son moi dans un futur.
Le désir de dieu c’est la foi, il ne passe pas satisfaction immédiate car la religion ne cherche pas à apporter le bonheur sur terre, mais promet un salut à venir.
La religion crée un désir qu’on nous a suscité mais c’est un désir que personne n’a pu vérifier la réalisation. Ceux qui naissent avec désir de dieu cela n’existe pas.
Chaque société humaine régule les désirs des individus voire les muselle.
Les 10 commandements religieux sont un code civil inspiré des codes babyloniens
Les mythes ont déjà eu la réflexion du désir en tant que soif inextinguible : Tantale, tonneau des Danaîde, le phénix qui renaît de ses cendres.
La passion c’est la souffrance étymologiquement. Les Romantiques ont mis en avant les passions comme principes moteur des grandes actions. Malheur à celu qui qui ne désire pas.
Comment les société gèrent le désir de mort ? Celui de l’individu est condamné mais celui du groupe est glorifié en tant que patriotes.
Peut-on opposer Eros et Thanatos, le désir de vie à celui de mort ?
Désir s’éteint s’il s’agit de posséder un être mais il peut être de l’être de chercher à aller voir dans le couple plus profondément ce qu’est l’autre.
Que se passe-t-il quand il n’y a plus de désir ? C’est une maladie nommée Anhédonie (perte de sensibilité au plaisir ou perte de la composante subjective du plaisir). Cela qualifie la perte de plaisir dans les mélancolies, neurasthénie.
« Et le désir s'accroît quand l'effet se recule. » (Corneille)
« Il n’y a véritable jouissance que dans le renoncement » (Colette)